1 juin 2021

Le e-learning : l’universelle panacée pour la Direction !

La pandémie nous a tous forcés à travailler à distance. Pour les enseignants, il a fallu repenser tous les cours et toute la pédagogie pour l’adapter au mieux à cette situation. Très vite, le système a montré ses limites : manque d’équipements, problèmes de connexion, désocialisation, accentuation des différences de niveau, sentiment d’abandon ressenti par les plus faibles, usure de tous, enseignants et apprenants, absence de logiciel de surveillance des tests en ligne rendant les évaluations très aléatoires, etc.
Pourtant la Direction y a vu l’aubaine de l’année ! Enfin, les enseignants qui depuis longtemps l’alertaient sur ces difficultés, se trouvaient au pied du mur et ne pouvaient plus refuser la fameuse digitalisation. Ignorant toutes les difficultés et les écueils, la Direction se concentre sur son objectif premier : faire des économies ! C’est bien connu, les enseignants, privilégiés et protégés, sont rétifs au changement, martèle-t-elle volontiers. Non, les enseignants ne sont pas rétifs au changement mais ils sont préoccupés par une donnée que la Direction semble avoir totalement oubliée : la qualité de la pédagogie et de notre service d’intérêt général.
Penser que le Smartphone est le prolongement du bras du jeune n’est pas faux. Il suffit juste d’intégrer que c’est pour eux un outil ludique et de lien social, certainement pas un outil d’apprentissage. Le miracle de l’apprenant autonome devant son écran n’arrivera pas ! C’est un leurre et ce, quelque soit le niveau dudit apprenant, en tous cas dans nos écoles. Le premier confinement l’a bien montré.

Alors, au final, quel est le problème ?
La Direction impose :
  • des quotas de e-learning : tiennent-ils compte des distinctions de niveau, de disciplines, de diplôme ?
  • des cours digitaux asynchrones (un cours enregistré une fois pour toutes et diffusé à l’infini).
Nos inquiétudes :
  • Pas de stratégie claire, pas d’accompagnement, pas d’objectifs pédagogiques, pas de moyens concrets sur le terrain alors même que l’opération est déjà lancée dans certaines EESC de manière totalement désorganisée.
  • Pas de réflexion sur la valorisation de ces « cours ». Le Titre III régit encore les enseignants. Sur quel article les managers s’appuient-ils pour positionner des cours à coefficient 1 ?
  • Quid de la propriété intellectuelle, notamment pour les documents déposés sur Blackboard ?
  • Quel est l’impact de cet enseignement asynchrone sur les plans de charge des enseignants et sur leurs conditions de travail ? Quid du devenir du métier d’enseignant ?
  • Comment les entreprises vont-elles accepter de rémunérer leurs apprentis pour qu’ils restent chez eux devant leur écran ? Ou préfèreront-elles faire appel à des CFA où les cours se font en présentiel ?
  • Comment gérer l’accident du travail de l’apprenant devant son écran chez lui ?
  • Qu’est-ce que ce dispositif apporte aux apprenants pédagogiquement parlant ? Quelle est la plus value pour nos apprenants, notamment ceux en apprentissage ? Quel est son coût financier ?
  • Comment s’assurer que ces cours digitaux sont matériellement accessibles aux apprenants ? (équipements, connexion, espace physique correct et adapté)
  • Comment déployer un tel enseignement alors que, contrairement à ce qu’exigent notre statut et notre règlement intérieur, aucune Instance Paritaire de Concertation ne s’est réunie à ce jour pour, au moins, discuter la nécessité d’un tel dispositif, déterminer les objectifs pédagogiques à atteindre et les modalités de sa mise en œuvre ?
Alors, bien sûr, pour mieux « vendre » le concept, il fallait un emballage marketing adéquat. C’est chose faite ! Le phygital est né ! Ce terme, contraction des mots « physique » et « digital », renvoyant à une stratégie marketing pour développer du chiffre d’affaires, fait de nous des marchands et de nos apprenants, leurs familles et leurs entreprises de simples consommateurs. Il remet ainsi profondément en question notre mission d’intérêt général si chère pourtant, à les en croire, au Président Kling et aux élus de notre CCIR. Notre mission de formation et d’éducation ne peut et ne doit se résumer à une simple relation client/fournisseur.
L’objectif serait donc de rendre ce déploiement moderne, tendance, branché. En apparence tout au moins... Car la réalité est tout autre : injonctions contradictoires, des EESC qui bidouillent chacun à leur sauce une directive floue ni objectivée ni motivée, des enseignants livrés à eux-mêmes qui se débrouillent comme ils peuvent face à des créneaux vides de sens positionnés dans l’emploi du temps de façon totalement aléatoire.

La CGT a demandé que soit porté à l’ordre du jour de la CPR du 7 juin un éclaircissement sur ce chapitre épineux du e-learning. Elle espère que la Direction présentera une directive claire avec des objectifs concrets et atteignables, des moyens précis et dédiés sur le terrain et une prise en compte dans le plan de charge des enseignants, dans le respect du titre III. Faute de quoi, le « phygital » se métamorphosera bientôt en « piège fatal et abyssal ».

Fidèle à ses engagements, la CGT continue à se mobiliser, à vous informer et à agir dans l’intérêt des agents.

Un article du syndicat CGT CCI Paris IDF Chambre de Commerce et d'Industrie Paris IDF

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